L’ORIAS vient de publier son rapport annuel 2017 : analyse de Bruno ROULEAU qui décrypte pour madeincourtage.fr le marché des intermédiaires bancaires.
Métier en pleine expansion, marché soutenu et en phase de maturation avec son lot de redéploiements et ses concentrations, le marché des intermédiaires bancaires est encore touffu et peu lisible quant à sa composition précise.
D’une part, parmi le nombre d’entités recensées par l’ORIAS, il y a toutes les catégories d’IOBSP, d’autre part la nature de l’organisation juridique et commerciale de réseaux ou enseignes rend le dénombrement complexe. Ainsi comment comparer une enseigne nationale disposant du statut de courtier et intervenant essentiellement avec des mandataires, avec un cabinet représenté uniquement par son fondateur ?
Par ailleurs, les impacts des différentes réglementations ont incité des acteurs économiques, à la périphérie de l’activité d’intermédiation, à se positionner sur le choix d’un statut. Les professionnels de l’Immobilier ont ainsi été dans le doute en regard à leurs habitudes praticiennes ou aux obligations réglementaires inhérentes à leur profession. Egalement, l’attitude des banques dans la délivrance ou non de mandats a évolué au fil des années avec la prise de conscience des responsabilités et du coût générés par la gestion de mandataires. Enfin, selon les domaines d’activité concernés (Regroupement de crédits, crédit immobilier, crédit à la consommation…), la stratégie des banques n’est pas la même et les besoins exprimés par les opérateurs non plus.
Le rapport 2017 de l’ORIAS (Organisme Registre des Intermédiaires en Assurance, Banque et Finance) rendu public tout récemment ne permet qu’une approche statistique de la situation. Mais celle-ci reste cependant intéressante et éclairante. Les organisations professionnelles existantes seraient à ce stade les mieux habilitées à parfaire la lisibilité du paysage, mais la fragilité de leur structuration et l’absence de mise en commun des informations, rend la précision de l’exercice impossible.
Afin d’essayer d’y voir un peu plus clair, je vous propose de procéder par éliminations.
Les différentes catégories d’IOBSP (voir définitions) cumulées affichent un total recensé à fin 2017 de 30.509 entités enregistrées. Ce qui fait une augmentation en 2 ans de 13,85%.
Dans le détail :
- les Courtiers représentent 6.314 structures (hausse sur 2 ans de 20,9%),
- les Mandataires exclusifs 3.970 entités (baisse de 2,6%),
- les Mandataires non exclusifs 11.414 entités (hausse de 15,2%),
- les Mandataires d’IOBSP 8.811 entités (hausse de 16,1%).
S’agissant des mandataires exclusifs
Ils sont le fait principalement de 2 réseaux identifiés que sont Crédit Foncier et les agents AXA Banque qui distribuent l’activité bancaire (36%). On y trouve aussi les acteurs de la distribution du crédit à la consommation qui officient à titre accessoire (51%), notamment dans le secteur automobile. L’évolution baissière tient avant tout au retrait des banques de réseau du statut, pour les raisons invoquées précédemment, et à l’abandon du statut par les entités elles-mêmes, soit pour basculer vers un autre statut, soit par arrêt de l’activité accessoire.
Pour ce qui concerne les Mandataires non exclusifs
C’est plus touffu. Les acteurs qui distribuent exclusivement du crédit à la consommation pèsent pour 41% du total, ce qui laisse à penser qu’il s’agit là principalement d’opérateurs à titre accessoire intervenant dans des activités de négoce (matériels, équipement de la maison, véhicules…). C’est de l’extrapolation mais basée sur une logique, et il conviendrait de rattacher à cette proportion les 17% de distributeurs de crédit à la consommation avec une autre activité ou des services de paiement, ce qui ferait un total de 58% de MOBSP à titre accessoire. Il est intéressant d’ailleurs de noter que l’enregistrement en qualité de MOBSP non exclusif n’oblige pas de disposer de plus d’1 mandat. La généralisation du choix de ce statut au détriment du statut de MOBSP exclusif explique sans doute aussi l’évolution constatée. Le nombre d’acteurs en crédit Immobilier est de 16% si on additionne ceux qui cumulent les activités, ce qui renforce la situation évoquée du nombre limitée et le repli sous la pression des mandants bancaires. Il y a fort à parier que ce chiffre regroupe avant tout des entités locales de l’immobilier dans la construction ou la promotion, voire des structures filiales bancaires du marché du Neuf.
Les Courtiers et les MIOBSP
Les catégories qui sont les plus complexes à analyser sont celles des Courtiers et des MIOBSP. D’une part parce qu’elles sont souvent liées. En effet, bon nombre de cabinets ou d’enseignes se développent en utilisant, soit exclusivement soit alternativement le statut de MIOBSP pour le recrutement des conseillers. D’autre part, parce que les salariés des cabinets d’IOBSP n’ont pas à être enregistrés auprès de l’ORIAS. L’activité de COBSP intervenant dans le crédit immobilier représente 79% des entités inscrites. Parmi cette population, de loin la plus nombreuses, 36% n’exerce que sur cette activité, et 15% n’exercent qu’en crédit immobilier et crédit à la consommation. C’est dire l’émiettement encore de cette profession dans le paysage. Et si on s’intéresse aux entités inscrites en activité principale de crédit immobilier mais distribuant aussi les autres formes de crédit (RAC, Crédit Consommation, autres activités, y compris prêts viagers), cela représente une population de 6 %. Or toutes les enseignes nationalement connues se retrouvent dans cette situation. Cela dénote la concentration de la production intermédiée de crédits (estimée pour 2017 aux environs de 60-70 Mrds d’€) entre les mains d’un nombre réduit d’acteurs. Et c’est là où la difficulté de rapprocher les effectifs MIOBSP de ces structures du nombre d’opérateurs enregistrés à l’ORIAS est la plus grande, puisque les MIOBSP ne sont pas forcément enregistrés pour toutes les activités que peut proposer l’enseigne mandante.
Dans cet environnement, le développement des enseignes nationales sous forme de franchise ou de licence ajoute à la réalisation de statistiques relatives au nombre moyen de personnes dans chaque cabinet et à la production moyenne par conseiller.
Aujourd’hui, force est de constater que le marché émergent, sur le plan réglementaire et législatif, de l’intermédiation bancaire, porté par un engouement des consommateurs et par une période économique favorable, a fait grossir le rang des IOBSP. La concentration des productions, le repli des banques dans la distribution de mandats (je dis bien mandat, pas convention), et le durcissement des obligations réglementaires va plutôt impacter dans l’avenir la catégorie des courtiers sur le plan statistique. Il y a fort à parier que l’évolution ira vers une inscription multi-activités, et dans un rétrécissement du nombre de petits cabinets, avec usage de la catégorie des MIOBSP comme variable d’ajustement au niveau de l’activité. Côté mandataires, les exclusifs devraient continuer de s’effriter, et les non exclusifs être identifiés au sein d’enseignes nationales intervenant principalement à titre accessoire sur des opérations de crédit liées à leur cœur de métier (une mise en conformité donc avec la réglementation).
Bruno ROULEAU
Directeur des partenariats et
Porte-Parole de l’enseigne In&Fi Crédits