Carrière dans le courtage : réussir après une reconversion professionnelle
Lorsqu’on interroge des professionnels du courtage en crédit sur leur parcours antérieur, beaucoup indiquent être issus du monde bancaire. Après une expérience en agence et parfois un détour au siège sur un métier support, des dizaines de cadres bancaires se lancent dans l’aventure du courtage chaque année. Leur motivation : pouvoir se consacrer à 100% à l’accompagnement de leurs clients dans leurs projets de financement !
Pour autant, si cela peut paraître « la voie royale », ou en tous les cas, « la voie naturelle », d’autres chemins existent ! Et Made in Courtage a rencontré ces femmes et ces hommes qui, un jour, ont décidé de se reconvertir et de devenir intermédiaire en opérations de banque et services de paiement (IOBSP).
Mais avant tout, rappelons en quoi consiste le métier d’IOBSP.
C’est la loi de régulation bancaire et financière qui a défini l’intermédiation bancaire, le 22 octobre 2010. Plongeons-nous dans le Code monétaire et financier pour en savoir plus. L’article L.519-1 définit l’intermédiation comme « l’activité qui consiste à présenter, proposer ou aider à la conclusion des opérations de banque ou des services de paiement ou à effectuer tous travaux et conseils préparatoires à leur réalisation. »
L’article R.519-1 nous précise : « est considéré comme présentation, proposition ou aide à la conclusion d’une opération de banque ou à la fourniture d’un service de paiement le fait pour toute personne de solliciter ou de recueillir l’accord du client sur l’opération de banque ou le service de paiement ou d’exposer oralement ou par écrit à un client potentiel les modalités d’une opération de banque ou d’un service de paiement, en vue de sa réalisation ou de sa fourniture ».
L’ACPR (Autorité de Contrôle Prudentiel et de Régulation) nous éclaire un peu plus dans sa Foire aux questions relatives aux IOBSP :
« La qualification d’une activité comme un acte d’intermédiation s’apprécie de facto au regard de la définition légale (“présenter, proposer ou aider à la conclusion des opérations de banque ou des services de paiement ou à effectuer tous travaux et conseils préparatoires à leur réalisation”) quelle que soit la dénomination du contrat.
L’intermédiation en opérations de banque et en services de paiement comprend, par exemple, la publicité faite par les intermédiaires (sur leur site internet notamment) pour les produits proposés (“présenter”) et les travaux de back office comme une analyse de solvabilité d’un dossier (“aider à la conclusion »). »
Et de préciser : « l’intermédiation vise en définitive à mettre en relation un client avec un établissement de crédit ou un établissement de paiement. »
Nous voilà fixé avec cette formulation proche d’une Lapalissade : l’intermédiaire en opérations de banque et services de paiement est donc… un intermédiaire qui met en relation deux parties – un client et un établissement de crédit et ou de paiement.
En pratique, l’IOBSP va donc accompagner son client dans la recherche et l’obtention du financement le plus adapté à sa situation : en terme de taux, de durée, d’assurances… L’intermédiaire en crédits s’attache à obtenir l’accord d’un ou plusieurs établissements prêteurs, négocie les conditions et remet à son client la meilleure proposition obtenue.
Tour à tour, l’IOBSP va donc endosser plusieurs rôles.
Avant toute chose, il y a une dimension commerciale ! En effet, si la part du marché du courtage augmente chaque année (en crédit immobilier par exemple, les IOBSP ont représenté près de 40% du volume financé par les banques en 2020), « pas de client, pas de dossier » ! La première mission du professionnel de l’intermédiation sera donc de développer son sens des relations commerciales. Notoriété locale, animation de prescripteurs d’affaires, réseaux… autant de sources potentielles pour multiplier les contacts.
Ensuite, l’IOBSP va mettre en oeuvre toute sa technique pour analyser la situation de son client, son projet : cette phase qu’on qualifie d’analyse de la faisabilité, mobilise de nombreuses facultés. Reformulation du besoin client, recueil des pièces justificatives, recherche du plan de financement adapté au projet : un travail parfois long en fonction de la complexité du dossier ! Mais où l’IOBSP va pouvoir exprimer toute son expertise.
Et son travail ne s’arrête pas là : une fois établie la stratégie du plan de financement avec son client, l’intermédiaire va entrer en phase de négociation avec les établissements bancaires. Agissant au nom du client, ses qualités commerciales et techniques vont permettre d’aboutir à un accord de prêt dans les conditions les plus favorables et adaptées au projet !
Ainsi, l’IOBSP concentre trois qualités : un tempérament commercial, un savoir-faire technique, des talents de négociateur.
Autant dire qu’en principe, il ne s’ennuie pas.
A la lecture de cet essai pour résumer le travail de l’intermédiaire bancaire, une conclusion (facile) s’impose : qui mieux qu’un banquier peut donc réussir ? Il a, de fait, des compétences commerciales ; il a la qualification technique ; et il connaît « le système » de l’intérieur, ce qui doit favoriser la négociation.
Pour autant, cette conclusion est bien trop hâtive. Le courtage bancaire recèle de nombreux exemples de femmes, d’hommes, de tous âges, qui ont embrassé ce métier sans aucun passage en banque et qui exercent aujourd’hui leur profession avec passion et réussite après une reconversion professionnelle.
Rencontre avec Brigitte, Franck et Julien, 3 exemples de reconversion professionnelle réussie !
Brigitte, tu as travaillé plus de 20 ans dans la grande distribution, avant de devenir intermédiaire en crédit. Raconte-nous ton parcours.
– Brigitte : En effet, j’ai fait l’essentiel de ma carrière dans le secteur de la grande distribution, plus précisément en tant qu’acheteuse. Avant de franchir le pas, j’étais responsable dans une centrale d’achat pour le compte d’une grande enseigne de la distribution.
Franck, tu as eu aussi une longue expérience dans l’automobile je crois, avant de te lancer dans le courtage !
– Franck : Oui, c’est exact. J’ai travaillé pendant 14 ans dans la même entreprise (groupe automobile avec plus d’une centaine de collaborateurs), d’abord comme conseiller commercial puis en tant que responsable d’une concession.
Comment avez-vous connu le monde du courtage ? Je suppose que vous ne vous êtes pas réveillé un matin en vous disant « je vais devenir IOBSP » ! (Rires)
– Franck : Non, c’est clair ! En fait, c’est en 2012 que la première rencontre avec ce métier se réalise. L’un de mes anciens collègues de l’auto était parti dans un réseau de courtage. Il m’a proposé de le rejoindre, mais pour moi c’était encore trop tôt. Mon métier me plaisait, j’avais une sécurité de l’emploi : je crois que je n’étais pas prêt à l’époque pour me lancer dans une nouvelle aventure.
– Brigitte : De mon côté, c’est aussi par un ami que j’ai découvert ce métier. Il m’a proposé de l’accompagner pendant 2 ou 3 jours, une forme de stage d’immersion – et le métier m’a tout de suite plu !
Julien, tu es le benjamin de notre interview ! Comment cela s’est passé pour toi ?
– Julien : En fait, je ne venais pas du tout de la filière bancaire. Je venais de terminer un diplôme de pâtissier, qui m’a permis de découvrir très tôt le monde professionnel. Mais je n’avais pas forcément envie de continuer dans cette voie, et j’ai eu l’opportunité de rejoindre un réseau de courtage en mars 2018 : ils m’ont fait confiance dès le début. Malgré ma jeunesse, j’ai misé sur mes compétences commerciales et ma volonté de développer mon activité.
– Brigitte : Sans connaissance particulière du monde de la banque, c’est mon expérience de la relation, des chiffres et de la négociation, qui m’a permis très vite de m’épanouir dans ce métier. J’ai eu l’avantage en plus de rejoindre dès le départ un réseau à taille humaine, où j’ai pu bénéficier d’une formation interne et d’un accompagnement de qualité. Après avoir conclu une rupture conventionnelle avec mon employeur précédent, j’ai démarré en auto-entrepreneur avant de créer ma société.
– Franck : 4 ans après que mon ancien collègue m’ait parlé de son métier, je me suis décidé à le rejoindre. Je ne souhaitais plus poursuivre dans le monde de l’automobile et après plusieurs semaines j’ai réussi à obtenir une rupture conventionnelle. J’ai créé tout de suite une EURL.
Le fait d’avoir bénéficié d’une rupture conventionnelle (et donc de Pôle Emploi pour vous lancer) a été une aide précieuse ?
– Franck : Clairement. Les 2 premières années m’ont permis de constituer de la trésorerie : il faut faire attention à ne pas mélanger l’argent de son entreprise et son argent personnel. Lorsque j’ai quitté mon employeur précédent, j’avais mon prêt immobilier, nous venions d’avoir un enfant : il a fallu aussi que je rende ma voiture de fonction et m’en acheter une autre ! Nous avons été très précautionneux, mais je ne le regrette pas !
– Brigitte : J’arrivais à un moment de ma vie où je ne souhaitais plus être salariée. Déjà très autonome dans mon poste, je souhaitais devenir indépendante, créer ma structure. Les indemnités Pôle Emploi ont permis de passer les premiers mois. Surtout, j’ai gagné en qualité de vie : ça, ça n’a pas de prix.
Sans « bagage bancaire », il vous a fallu vous former pour devenir des spécialistes du crédit ! Comment cela s’est fait en pratique ?
– Julien : En effet, et cette formation obligatoire ne remplace pas aussi la formation que peut nous apporter le réseau !
– Brigitte : Bien sûr la formation technique est indispensable. Mais j’ai aussi capitalisé sur mon savoir-faire et mon savoir-être acquis précédemment ! La technique s’acquiert, on apprend, on se perfectionne. Mais d’autres qualités doivent être prérequises pour réussir dans le courtage.
– Franck : Après la formation technique, j’ai tout de suite mis en pratique ce que m’avait apporté mon expérience professionnelle : le sens de l’accueil, de l’écoute, le conseil et toute la dimension commerciale !
Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un souhaitant rejoindre le monde du courtage ?
– Brigitte : Commencer par se renseigner, faire un stage d’immersion – cela permet de vérifier qu’on est fait pour ce métier ! Ensuite, je recommande de pouvoir bénéficier d’une rupture conventionnelle. Cela permet de sécuriser le démarrage de sa nouvelle activité. Enfin, il faut se lancer ! Mais attention à la trésorerie. Le cap le plus important est celui des 6 premiers mois, avant que les premiers dossiers se financent et qu’on commence à percevoir ses commissions.
– Julien : Les 6 premiers mois, j’ai travaillé à fond pour me faire connaître ! Auprès de mon réseau personnel mais aussi beaucoup auprès des professionnels de l’immobilier (agences immobilières, mandataires…) : pas toujours facile ! Quand on est indépendant, il ne faut surtout pas tomber dans la routine. C’est dehors que ça se passe pour trouver des dossiers !
– Franck : Il faut oser ! Travailler sans relâche, faire attention à la trésorerie au départ (et d’ailleurs, tout le temps !).
Merci à tous les 3. Une dernière question : avez-vous un jour regretté votre choix de devenir IOBSP ?
– Tous : Non ! A aucun moment !