L’occasion au travers de cette interview de découvrir plus en détail le parcours de Floriane, son activité et son point de vue sur la formation professionnelle des courtiers.
Bonjour Floriane, tu es associée gérante de PERITUS FORMATION et nouvelle contributrice pour le blog Made in Courtage, la 1ère communauté dédiée aux courtiers. Peux-tu nous présenter ton parcours ?
Floriane DEBORD – Bonjour Eric, je te remercie tout d’abord pour ta confiance. Made in Courtage me semble être une formidable source de renseignements pour les courtiers intermédiaires en assurances et/ou en opérations de banque. Pas toujours simple en effet de se retrouver parmi toutes les règlementations et les évolutions du monde du courtage ! Comme il n’est d’ailleurs pas toujours simple de présenter son parcours de manière exhaustive et synthétique, surtout pour une juriste, pour qui les détails comptent.
Tu l’auras compris, j’ai en premier été une praticienne du droit, une universitaire qui a adapté mes connaissances et compétences juridiques au monde réel dans un cabinet de courtage en assurances où j’ai pu me confronter au métier de commercial, à la communication, au marketing et surtout aux problématiques quotidiennes des opérationnels vis-à-vis du client, de la compagnie mais aussi de nos partenaires commerciaux.
N’aimant pas les zones de confort, après 6 années passées chez ce courtier bordelais, je me suis lancée un nouveau défi : transmettre à des étudiants, futurs professionnels de l’assurance, leur apporter mon expérience terrain et en même temps continuer de m’enrichir de l’humain.
Tu as créé PERITUS FORMATION en juin 2017 : quel a été le déclic ?

Je ne crois pas qu’il y ait eu un déclic mais un parcours qui m’a amenée à l’entreprenariat d’une part, et à la volonté de créer une solution et une réponse de qualité dans le monde de la formation professionnelle d’autre part. Ne soyons en effet pas « Bisounours », il y a trop d’acteurs qui profitent des obligations légales et règlementaires et du financement des formations par les OPCA (devenus OPCO) sans proposer selon moi, de solutions de proximité. Proximité géographique qui m’a conduite à La Réunion où l’offre de formation est très réduite ou encore proximité opérationnelle qui m’a donné envie de développer des parcours métiers / compétences pour les professionnels du courtage.
Et puis, mes deux métiers (chargé de formation en écoles et conceptrice / animatrice de formations professionnelles avec PERITUS) sont complémentaires. Les échanges avec les courtiers, les gestionnaires et les commerciaux des sociétés de courtage me maintiennent dans le monde du réel et m’évitent de transmettre seulement du savoir au détriment du savoir-faire et du savoir être, tout comme mes formations en école me permettent de mieux comprendre les problématiques et attentes des professionnels. Mes étudiants sont effet leurs anciennes et leurs futures recrues.
L’obligation de formation continue des professionnels de l’assurance s’est récemment renforcée. Peux-tu nous rappeler ces obligations ?
Avant toute chose, je pense bien de préciser qu’avant la loi du 15 Décembre 2005 transposant la première Directive européenne sur l’intermédiation en assurances (DIA I) de 2002, tout le monde pouvait vendre des contrats d’assurance, et ce, quels que soient sa formation et ses compétences initiales, le type de contrats vendus, le public averti ou non et les modalités de distribution parfois agressives ou trompeuses. Tout ça a selon moi participé à l’adage : « assureur… voleur, escroc… » et a certainement nuit à la confiance des clients.
Petite anecdote personnelle : je me souviens avoir envoyé un jour un coupon découpé dans un magazine de programmes télé. On était dans les années 90, c’était alors assez courant et possible même pour une gamine, de souscrire un contrat d’assurances obsèques, sans en connaître le contenu, les modalités et les obligations qui en découlaient. Ma mère en recevant le contrat a évidemment pu le faire annuler mais n’était pas vraiment contente.
A cette époque, les possibilités de « vente » d’un contrat d’assurance étaient presque sans limite. Très facile pour un « bon » commercial sans réelles connaissances assurantielles de profiter de la méconnaissance ou de la faiblesse des clients pour leur faire souscrire des contrats pas adaptés, ou encore aux clauses bien obscures. Évidemment, tous les courtiers ou commerciaux n’agissaient pas ainsi mais il y avait incontestablement dans le paysage des personnes de ce type…
Dans un souci de protection de la clientèle, la Directive sur l’intermédiation en assurances de 2002 et la loi de 2005 qui en résulte, a encadré le monde du courtage en donnant une typologie et une définition des intermédiaires en assurances, en définissant une obligation d’information précise à la charge de l’intermédiaire avant l’entrée en relation avec le client et avant la souscription du contrat ainsi qu’en imposant la formalisation d’un devoir de conseil écrit. C’est depuis son entrée en vigueur en 2007 que les intermédiaires doivent aussi être immatriculés sur le registre unique ORIAS, permettant aux clients de vérifier l’existence mais aussi les compétences et les garanties de son professionnel.
DIA I imposait des niveaux de connaissances et/ou d’expérience pour les intermédiaires et leurs collaborateurs prenant part à une activité d’intermédiation uniquement au début de la relation c’est-à-dire lors de l’immatriculation ORIAS ou lors du recrutement. La nouvelle Directive dite DDA II consacre une réalité : le marché et le cadre légal de l’assurance sont soumis à des évolutions permanentes qu’il faudra désormais actualiser chaque année à hauteur de 15 heures minimales.
Une formation, même rendue obligatoire par la réglementation, n’a de sens que si elle est pertinente pour le professionnel. Comment choisir le bon format (présentiel, e-learning, mixte) ?
Nous sommes encore d’accord : ces formations obligatoires doivent être PERTINENTES pour le professionnel qui peut aussi voir cette obligation de formation comme une opportunité de partage, d’élargissement et d’actualisation des connaissances, de résolutions de problématiques ou encore, de baisse des risques de réclamations et de mises en cause de sa responsabilité civile.
Nous l’avons vu DDA II impose une obligation de formation annuelle de 15h pour les intermédiaires et leurs collaborateurs intervenants dans la distribution de produits d’assurance (en résumé : tous les collaborateurs sauf ceux chargés exclusivement de gestion de sinistres ou encore le collaborateur purement support de l’activité : comptable, chargé de communication etc.). Un arrêté du 26 Septembre 2018 définit les domaines de compétences dans lesquels une formation peut avoir lieu et laisse « heureusement » la liberté aux intermédiaires de choisir les modalités.
Heureusement car la pertinence des programmes et des modalités de formation (présentiel, e-learning, mixte) n’est pas la même pour chacun. Chaque solution présente ses avantages et aussi ses inconvénients mais toutes les solutions ne sont pas adaptées à chacun.
Le e-learning, même s’il a le vent en poupe comme on dit, n’est pas selon moi la solution la plus adaptable à tous. Il demande une volonté, une auto-motivation et du temps régulier à consacrer. Difficile par ailleurs de personnaliser la formation et de s’adapter à ses besoins réels dans la mesure où les échanges avec les formateurs et les autres apprenants ne sont pas permis.
Le e-learning me fait penser à un programme sportif que l’on trouverait sur internet. On est motivé les premiers jours et puis, souvent, la solitude derrière l’écran et l’absence immédiat de retour ont tendance à nous faire délaisser ce concept.
Le blended-learning dit parcours mixte est comme son nom l’indique un mélange entre le e-learning et le présentiel. Il se compose de modules à réaliser seul et de sessions en classe virtuelle ou en présentiel. C’est à mon sens une solution presque idéale sur des parcours longs comme ceux visant la capacité professionnelle niveau I ou II d’une durée minimale de 150h car ils permettent d’organiser son temps et son rythme d’apprentissage en fonction de ses contraintes mais sur des parcours de 15 heures, j’avoue avoir du mal à organiser une articulation pertinente.
Pour moi donc, et même si ma toute première idée concernant PERITUS était en contradiction avec ce que je pense aujourd’hui (je voulais en effet proposer avant tout du e-learning), le présentiel est la solution la plus pertinente.
D’une, car le courtier de proximité est parfois un peu isolé, notamment dans certains secteurs géographiques, d’où le fait que nous ayons choisi de nous déplacer dans des villes moyennes ou difficiles d’accès (il faut un avion pour La Réunion ou une barque vraiment très solide).
De deux, car la formation doit être un cadre qui s’enrichit au fil des échanges et des questions avec le formateur mais aussi entre les apprenants.
De trois, car cela consacre un temps défini en amont, à une formation.
Pour finir, je dirai quand même que le choix d’une formation pertinente doit se faire au regard de ses besoins et que chaque Homme ayant des besoins et envies différents, une seule vérité n’existe pas vraiment. C’est là où l’humilité, l’empathie et la remise en question doit prendre tout son sens pour l’organisme de formation.
Merci Floriane pour ton éclairage. Nous aurons très vite le plaisir de te lire à nouveau sur Made in Courtage, à bientôt !